Les politiciens, les ultrariches et les grandes entreprises, ainsi que l’immense industrie des intermédiaires professionnels qui facilitent la corruption et l’évasion fiscale, voudraient vous faire croire qu’il est extrêmement difficile de réparer notre système fiscal et de rendre le secteur bancaire et financier plus transparent.
C’est faux. Les législateurs et les réglementeurs pourraient mettre en œuvre aujourd’hui des solutions pour mettre en place un système fiscal et financier au service des intérêts de la société dans son ensemble.
Premièrement, l’impôt a une raison d’être beaucoup plus vaste que vous ne le pensez. Jetez un coup d’œil à formule des 4 R de l’impôt :
Oui, l’impôt devrait générer des RECETTES, pour le système de santé, les écoles, les routes et les autres services publics essentiels.
Mais il devrait aussi REDISTRIBUER, pour s’assurer que ceux qui sont plus aisés que d’autres (qui vivent avec moins) contribuent davantage. C’est ce qui permet de réduire la pauvreté et de construire des sociétés plus justes.
Et les taxes sont des outils essentiels permettant aux gouvernements de REDÉFINIR le prix des produits clés afin de modifier le comportement des consommateurs et faire évoluer les marchés. Par exemple, nous savons qu’il est urgent de lutter contre le changement climatique : nous pouvons utiliser les taxes et les subventions pour pousser le marché de l’énergie à écarter les sources polluantes à forte empreinte carbone pour privilégier des sources d’énergie plus propres et renouvelables.
Enfin, en contrepartie de nos impôts, les citoyens doivent s’attendre à être REPRÉSENTÉS par leurs institutions. En bâtissant et en maintenant des institutions saines, l’impôt protège la démocratie et garantit que ceux qui sont au pouvoir doivent rendre des comptes.
Dans ce contexte, le réseau Tax Justice propose trois politiques clés, que nous appelons l’ABC de la transparence fiscale.
A comme Automatique : l’échange automatique de renseignements
Par le passé, l’échange d’informations financières entre les juridictions était auparavant « sur demande » (par exemple les infos sur les dépôts bancaires d’un suspect d’une affaire criminelle). Ce processus était fastidieux et très peu d’informations étaient fournies, c’était justement le cas des juridictions opaques où se trouvaient souvent des avoirs criminels. TJN a proposé l’échange automatique de ces informations entre les juridictions, de sorte qu’un pays fournisse chaque année aux autorités d’autres pays une liste de leurs résidents avec les comptes bancaires et les informations fiscales correspondantes. Il y a sept fois plus de chance que les contribuables respectent les obligations fiscales lorsqu’ils savent que les informations sur leurs revenus sont automatiquement transmises de cette manière — sans parler de l’impact sur les pots-de-vin et autres transactions criminelles.
B comme Bénéficiaire : les registres des bénéficiaires effectifs
Historiquement, dans la plupart des pays, il a été facile de cacher les détenteurs réels des sociétés, trusts et autres véhicules légaux. Non seulement cette capacité à dissimuler la propriété permet purement et simplement l’évasion fiscale — du fait de l’absence de déclaration —, mais facilite aussi les versements et transferts de propriété issus de la corruption (ce qui est la voie directe vers le blanchiment d’argent et le terrorisme).
Également, cela contribue à l’opacité des sociétés, ce qui a des répercussions sur la fiscalité, mais aussi sur la régulation du marché (par exemple, les monopoles cachés). Le réseau Tax Justice a proposé la mise en place de registres publics des bénéficiaires effectifs finaux des sociétés et des trusts (c’est-à-dire pour identifier publiquement l’humain en chair et en os qui se cache derrière une entité donnée).
Encore une fois, il s’agit d’une proposition technique impliquant une redistribution importante du pouvoir, à laquelle beaucoup ont vivement résisté.
C comme CbCR : le reporting pays par pays (Country-by-Country Reporting)
Les entreprises multinationales transfèrent souvent « artificiellement » leurs bénéfices vers des juridictions à faible taux d’imposition afin de minimiser leur charge fiscale. Dans le cadre d’une initiative dirigée par Richard Murphy, le réseau Tax Justice a créé une norme comptable de déclaration pour les multinationales qui se fait pays par pays. Cela nécessite la publication annuelle de l’emplacement des activités économiques des entreprises, des bénéfices et des impôts payés.
Ainsi, les multinationales peuvent être tenues pour responsables vis-à-vis de l’opinion publique (ainsi que de l’administration fiscale) en cas de décalage entre les bénéfices perçus et la localisation de leur activité réelle ; et les autorités fiscales doivent rendre des comptes sur leur niveau de tolérance (ou de son soutien) à l’égard de tels arrangements. Cet exercice de comptabilité technique implique un changement politique puissant — d’où la résistance des multinationales et des quatre géants des cabinets comptables (le « big 4 ») qui travaillent pour elles.
Pour que cela change, et faire respecter ces principes, nous devons tous faire pression sur les personnes décisionnaires de nos juridictions.
Chaque semaine, Taxcast discute des histoires et des sujets clés avec les personnes les plus influentes du secteur. Pour renforcer notre influence et faire pression pour le changement, nous avons besoin de plus d’auditeurs.
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